La phrase de Benjamin Franklin
A propos de la démocratie américaine, Benjamin Franklin s’est inquiété à l’issue de la Convention constituante de 1787 :
« C’est une république, à condition que vous sachiez la préserver. »
Comment préserver sa liberté ?
J’ai déjà expliqué l’importance de se battre, notamment pour conserver sa liberté d’expression, par exemple dans cet article. Mais je n’ai jamais expliqué comment.
Sondages occidentaux
Les sondages occidentaux arrivent tous au même constat : une majorité de citoyens ignorent les origines de leur République et leurs droits fondamentaux (cf. Nul n’est censé ignoré la loi, vraiment ?).
Autrement dit, leur propre système de gouvernement, qui se veut modèle de liberté, leur est inconnu.
L’ignorance
Combattre l’ignorance semble donc être la première des batailles.
Des citoyens ignorants ignoreront leurs droits les plus basiques, ne sauront pas les défendre ni se défendre eux-mêmes contre les abus de ceux qui en profitent.
L’indifférence
Combattre l’indifférence et l’abnégation représente aussi une deuxième manière de se battre.
Baisser les bras, dire « je m’en fiche de toute façon », ou s’en remettre à ceux qui nous dirigent sans jamais poser de question, voilà qui paraissait dangereux déjà à Benjamin Franklin au 18ème siècle.
A force de faire confiance à ceux qui savent parler, on prend le risque d’abandonner son destin, et celui de nos enfants, à de mauvais représentants.
Regard tourné vers l’Afrique
Dans certains pays d’Afrique, la différence est flagrante entre la classe dirigeante richissime dotée de propriétés et de voitures luxueuses, et le peuple qui dort de l’autre côté de la rue, par terre, au milieu des mouches, sans nourriture et sans abri.
La corruption en Afrique est visible : d’un côté les dirigeants s’en mettent plein les poches, de l’autre le peuple meurt de faim.
Dans les pays occidentaux cette opposition est moins marquée. Mais elle existe. A force de laisser faire, elle existera de plus en plus, jusqu’au jour où le peuple s’apercevra trop tard qu’il ne peut plus faire marche arrière.
Lorsque je parle aux Africains et que je leur demande pourquoi ils ne se révoltent pas contre le pouvoir en place, ils me répondent que cela leur est impossible car le pouvoir politique contrôle l’armée et que ces gens n’hésitent pas à les tuer. Le peuple a peur, a faim, est n’est pas armé.
➣ Les citoyens occidentaux ont davantage d’armes en leur possession
- il leur reste un petit espace de parole
- il leur reste la possibilité d’aller voter même si de plus en plus de tricheries sont relevées lors des suffrages
- il leur reste la possibilité de s’instruire
- il leur reste encore un peu de richesse pour avoir la force de se faire entendre
➣ Ces avantages sur le peuple africain s’amoindrissent de jour en jour
- Notre pouvoir d’achat, à nous peuple occidental, s’affaiblit
- Notre éducation s’affaiblit
- Notre volonté de nous instruire et de nous battre s’affaiblit
- Nos moyens de nous faire entendre et nos forces seront de moins en moins grands au fur et à mesure que nos élites mangeront les parts du gâteaux
Le jour arrivera-t-il où nous ne pourrons plus préserver cette république ?
Le danger croissant pour la démocratie en tant que phénomène mondial occupe une place centrale dans le nouveau livre de Diamond.
« Dans chaque région du monde, écrit-il, les autocrates prennent l’initiative, les démocrates sont sur la défensive et l’espace pour une politique compétitive et la libre expression se rétrécit. »
- Les démocraties matures sont de plus en plus polarisées, intolérantes et dysfonctionnelles.
- Les États démocratiques émergents croulent sous la corruption, luttent pour leur légitimité et se battent contre des menaces extérieures croissantes.
- Les dirigeants autoritaires deviennent simultanément plus répressifs à l’intérieur, plus agressifs à l’extérieur et plus convaincus qu’ils naviguent avec le vent dans le dos.
Pour beaucoup, cette nouvelle réalité plus sombre sera accueillie avec choc et déni. Après tout, il n’était pas censé en être ainsi.
Le modèle capitaliste démocratique a-t-il failli ?
Dans le sillage immédiat de la guerre froide, la sagesse commune voulait que le modèle capitaliste démocratique ait définitivement triomphé de son concurrent illibéral.
Dans les années qui ont suivi, cet optimisme a semblé particulièrement bien fondé, puisque le nombre de démocraties est passé de 46 en 1974 à 76 en 1990, puis à 120 en 2000, faisant passer le pourcentage d’États indépendants dans le monde de 30 à 63 %.
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En 1991, le politologue Samuel Huntington écrivait que :
« Des vagues successives de démocratisation ont déferlé sur le rivage de la dictature. Portée par une marée montante de progrès économique, chaque vague a progressé plus loin – et reculé moins loin – que la précédente ».
Même si bon nombre de ces nouvelles démocraties émergentes étaient assez peu libérales dans la pratique, Diamond a fait valoir que la progression mondiale de la démocratie est parallèle à une « expansion régulière et significative des niveaux de liberté », mesurée par les droits politiques et les libertés civiles.
En raison de ces tendances, et dans l’espoir d’intégrer des sociétés autrefois fermées dans un ordre mondial en expansion, l’Occident a poursuivi une politique d’intégration.
Dans un discours prononcé en 1993 devant les Nations unies, le président américain Bill Clinton a annoncé que :
« L’objectif primordial des États-Unis doit être d’élargir et de renforcer la communauté mondiale des démocraties fondées sur le marché ».
Pendant la guerre froide, nous avons cherché à contenir une menace pour la survie des institutions libres. Aujourd’hui, nous cherchons à élargir le cercle des nations qui vivent sous l’égide de ces institutions libres.
Le premier conseiller à la sécurité nationale de Clinton, Anthony Lake, a développé cette idée, affirmant que l’idée centrale animant la politique étrangère des États-Unis serait désormais :
« La stratégie d’élargissement de la communauté mondiale libre des démocraties de marché ».
Cette idée était ancrée dans la logique selon laquelle, à mesure que le nombre d’États libres augmentait :
- la probabilité de guerre diminuait
- la prospérité se répandait
- l’ordre international se renforçait
L’accélération de la croissance du soutien au libre-échange, à la liberté d’expression et à la liberté de gouvernement dans les années qui ont suivi la chute du mur de Berlin semblait confirmer que le pari de Clinton avait porté ses fruits.
➣ Mais ensuite, vers 2006, cet élargissement a semblé marquer le pas, puis s’inverser
Freedom House, une organisation non gouvernementale qui suit l’évolution de la démocratie et de la liberté politique dans le monde, a noté dans son rapport annuel 2018 que depuis 2006, 113 pays ont connu un déclin net de la liberté, et que pendant 12 années consécutives, la liberté mondiale a diminué.
L’indice de démocratie de l’Economic Intelligence Unit a de même enregistré le « pire déclin de la démocratie mondiale depuis des années. »
Diamond a souligné cette tendance inquiétante il y a plus de dix ans, écrivant en 2008 que :
« La vague démocratique a été ralentie par un puissant courant de fond autoritaire, et le monde a glissé dans une récession démocratique ».
Aujourd’hui, la nouvelle norme c’est l’autoritarisme
- La Hongrie, la Turquie et le Venezuela continuent de glisser vers un régime autoritaire.
- Les normes démocratiques se sont érodées aux Philippines et en Pologne.
- Le Myanmar, qui avait lentement commencé à ouvrir son système, a procédé à un nettoyage ethnique et emprisonné les journalistes qui le couvraient.
- Les gouvernements ne semblent plus écouter leur peuple dans toute l’Europe occidentale.
- Et, ce qui est peut-être le plus inquiétant dans une perspective à long terme, les jeunes semblent perdre la foi dans la démocratie.
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re bonjour
poursuivons à l’occasion par mail si vous êtes d’accord, pour ce post ou d’autres, plutôt que sur le blog. J’aimerais bien en savoir un peu plus sur ce que vous faites, votre rapport à l’Afrique aussi, lié peut être à votre milieu professionnel ? A bientôt
Je parlais d’immobilisme des idées, ces dérives autoritaires s’expliquent par le fait que ces gouvernements que le monde change, et qu’il veulent garder le contrôle à tout prix. Par exemple, le traité de l’ACTA qui est une sorte d’Hadopi Mondialisé m’inquiète fortement s’il est mis en place.
Une immobilité dis-tu. C’est là où nos opinions divergent ; tu sembles plus optimiste que moi. Si seulement je voyais la direction empruntée par nos démocraties stagner… Elle m’apparaissent, pour ma part, prendre une tournure de plus en plus autoritaire.
C’est un excellent article, mais je pense que le gros problème des pays africains est la déception, à chaque fois ils ont crus trouvés la bonne personnes, et ce n’était pas le cas. Les démocraties des pays riches et pauvres prennent des directions différentes, la première allant vers une immobilité, et la deuxième vers les pires abus.