J’aime souvent me reporter aux penseurs de l’Antiquité, tout simplement parce que leur pensée n’est pas censée être « orientée » par nos religions et nos habitudes de vie modernes. Leur discours fait du bien parce qu’il paraît plus pur, plus naïf mais aussi plus sincère.
Lorqu’on s’intéresse au problème de la mort, par exemple, on se rend compte que les religions ne sont pas les seules pensées à avoir cherché à en parler et à en combattre notre peur innée.
⇒ Résoudre le problème de la mort avec Socrate
Socrate, par exemple, au 5ème siècle avant notre ère, affirmait simplement que toutes les solutions radicales au problème de la mort ne sont que des escroqueries parce que personne ne peut être sûr de ce qu’elle est. Par contre, ce qu’il en affirme peut apparaître au craintif comme une véritable bouée de sauvetage :
- 1/ Soit la mort n’est qu’un sommeil éternel sans rêve, et dans ce cas-là nous n’avons pas à en avoir peur. Socrate va même jusqu’à la préférer à la vieillesse avancée qui dégrade le corps et ne laisse pas un bon souvenir à l’entourage.
- 2/ Soit la mort est l’émigration, d’une manière ou d’une autre, de l’âme vers un autre monde, et là encore elle est plutôt enviable.
Selon lui c’est la peur de la mort qu’il faut combattre. Sans apporter de solution radicale au problème de la mort et tout en se proclamant agnostique, c’est-à-dire retiré de toute religion, Socrate fait du bien. Les seules choses qui pouvaient l’effrayer semblent être la souffrance et les infirmités causées par la vieillesse, d’où son désir d’une mort plutôt rapide et précoce. Sophocle, au même siècle, insistait sur ce point par exemple dans Antigone :
« Mourir avant l’heure, je le dis bien haut, pour moi, c’est tout profit : lorsqu’on vit comme moi, au milieu des malheurs sans nombre, comment ne pas trouver de profit à mourir ? »
Sans promettre une vie paradisiaque dans un autre monde, la mort peut apparaître pour une délivrance quand la vie n’est qu’une succession de malheurs répétés. Elle évite les souffrances et infirmités de la vieillesse. Et si par hasard elle n’est pas définitive comme le disent les religions, ce n’est qu’un atout supplémentaire. Dans tous les cas, Socrate relativise le problème de la mort en rendant son idée moins éprouvante.
⇒ Qui était Socrate ?
Socrate est l’un des philosophes les plus célèbres de tous les temps. Son nom est bien connu, même de ceux qui ne s’intéressent pas à son travail. Les détails de sa vie, ainsi que certaines de ses citations et positions, font quasiment partie de la culture populaire. Et pourtant, Socrate, comme beaucoup de grands penseurs antiques, n’a jamais rien écrit parce qu’il trouvait l’écriture inférieure au dialogue en tant que méthode d’investigations. Tout ce que nous savons de ce qu’il a dit, fait ou pensé nous vient d’autres rédacteurs… et tous ne sont pas sur la même longueur d’ondes !
Que disent les sources?
La première source qui mentionne Socrate est une pièce de théâtre : une comédie d’Aristophane écrite en 423 avant notre ère, alors que Socrate aurait eu 47 ans. Socrate y est représenté comme un intellectuel excentrique qui essaie continuellement de se libérer de ses factures. Il dirige une petite école dédiée à la science et fait de l’argent en formant les jeunes à tourmenter leurs parents et combattre les collectionneurs de dettes à l’aide de la rhétorique.
Ce sont les deux accusations qui l’ont condamné à mort, même si Socrate soulignait combien cette représentation de lui était fausse (voir le procès-verbal du procès par Platon).
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Platon quant à lui, a écrit de nombreux dialogues avec son professeur, mais présente une figure de lui trop parfaite pour sembler tout à fait exacte. C’est Platon qui introduit, dans le discours de Socrate, la notion d’âme immortelle.
Lequel est le vrai Socrate ?
Le problème est bien entendu insoluble puisque les sources se contredisent et qu’aucune autre source ne peut être découverte après tant de siècles passés.
1ère théorie :
Le «vrai» Socrate est la personne rassemblant les points communs sur lesquels sont d’accord à la fois Platon, Xénophon et Aristophane… Ce qui fait peu de choses : Socrate serait un homme athénien laid, aussi brillant que curieux.
2ème théorie :
Socrate serait l’individu qui « sait qu’il ne sait rien ». Il essaie toujours d’apprendre davantage grâce à la recherche, tout en professant son ignorance.
3ème théorie :
Le véritable Socrate est le Socrate décrit dans les premiers dialogues de son élève Platon… même si nous ne savons pas exactement quand chaque dialogue a été composé.
4ème théorie :
Socrate est la personne ayant déplacé la philosophie grecque du thème de la réalité à celui de l’éthique, sans aborder la théorie des formes développée plus tard par Platon.
⇒ Quelques sources
- Euripide : Iphigénie à Aulis
- F. Schiller : la Fiancée de Messine (« La vie n’est pas la meilleure chose, mais la culpabilité est le pire des maux »)
- Platon : Apologie de Socrate
- Sophocle : Oeuvres I
- W. Kaufmann : Critique de la religion et de la philosophie, 1958
- Xénophon : Apologie de Socrate
- Jacques Choron : La mort et la pensée occidentale, Payot, 1969
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